Journée des femmes
Comme tous les 8 mars je suis partagée entre l'énervement qu'une seule journée soit consacrée aux femmes et permette le reste de l'année de se dédouaner de toutes les injustices encore subies, et l'intérêt pour les sujets évoqués ce jour-là dans les médias.
Même si voir qu'on a aussi peu évolué en matière d'égalité est toujours un peu déprimant.
Pour une fois cependant le sujet de la condition des femmes aujourd'hui a été présent en avance, notamment avec l'intense présence médiatique d'Elisabeth Badinter avec le sortie de son livre '"Le conflit- la femme et la mère".
J'ai d'abord écouté les interviews, hésité à acheter le livre, qui m'a été amené par ma mère.
Je peux donc en parler après lecture, ce qui est rarement le cas de ses contradicteurs en pratique, et je me suis aperçue que l'ouvrage prête bien peu finalement à polémique, qu'il est beaucoup plus mesuré que ce que l'on peut en imaginer à l'écoute des débats qu'il a provoqués.
La thèse est simple.
Enquêtes à l'appui, Badinter montre la baisse impressionnante de la fécondité dans les pays développés, même si le taux remonte un peu récemment, et l'étonnante exception française en ce sens. Elle l'explique par le poids croissant du modèle maternaliste imposé aux femmes, tant par les thèses naturalistes que les éthologues ou les nouvelles féministes, à force de valoriser l'expérience maternelle comme irremplaçable (merci au passage pour celles qui ne veulent pas d'enfant!) et d'imposer un niveau d'exigence en la matière très élevé.
En gros pour elle, à force de rappeler aux femmes qu'elles doivent comme mères tout donner leur enfant, le faire toujours passer avant elle-mêmes, l'allaiter le plus possible, s'arrêter pour s'en occuper jusqu'au moins 3 ans et s'épanouir dans ce choix de vie, se rapprocher de la nature donc exclure biberons, couches jetables, etc, on leur a mis en tête un modèle impossible de plus en plus rejeté, ou pour celles qui se lancent quand même, qui leur amène beaucoup trop de culpabilité de s'en écarter.
Elle soutient qu'il y a de multiples manières d'être femme, mère ou pas, et que chacune doit pouvoir, si elle devient mère, le faire comme elle l'entend, avec ou sans travail, mère nature ou pas, avec beaucoup de temps accordé ou pas, etc....
Evidemment je résume outrageusement, mais elle considère que les françaises sont restées avec plus d'enfants justement parce que le modèle maternaliste est moins fort culturellement chez nous, qu'on nous accorde plus le droit d'être d'abord une femme avant une mère, que du biberon aux crèches le retour au travail est facilité, même s'il reste encore beaucoup à faire pour une vraie égalité, notamment en raison de l'absence de réel partage des tâches avec les pères.
Mais elle pense que, même en France, la pression sociétale tend tout de même de plus en plus vers le modèle maternaliste qu'elle dénonce , et que notre génération de trentenaires est en train de se faire imposer un idéal de mère inatteignable: soit on est au foyer et déconsidérée dans le monde du travail, soit on continue à travailler et on est stigmatisée pour un allaitement pas assez long, pas assez de temps avec le bébé, et avec la majorité de la charge de la maison et du bébé au retour de la journée de travail.
Globalement je suis d'accord, même si ici ou là je trouve la démonstration un peu simplifiée et pas exempte de raccourcis clichés ,et pourtant, même si je me définis comme féministe, je correspond à la femme mère qui se plait pas mal dans l'élevage des enfants: congé parental, allaitement long, certes pas les couches lavables et autant de petits pots maison qu'achetés, mais quand même....
Tellement bloquée toute la journée que j'ai beaucoup de mal à trouver le temps d'écrire ce post, et que je le fais un peu à la va vite!
J'estime avoir fait mon choix librement, mais je suis d'accord avec elle pour dire qu'on se réfère toujours à un modèle implicite maternaliste, que ce soit pour le refuser, le suivre ou comme moi le négocier...en râlant toujours sur le partage inéquitable des tâches ménagères, en prenant du temps pour moi, en introduisant le biberon parce que c'est plus pratique pour laisser le petit, etc...
Et peut-être aussi en laissant les petits gars jouer autant à la poupée et dinette qu'aux voitures, mettre des colliers ou passer le balai?
En tout cas Badinter permet de déculpabiliser quelque soit son choix et le réinterroger régulièrement, et c'est déjà beaucoup....